Pouvez-vous nous présenter France générosités ?
Créé il y a 25 ans, France générosités est le syndicat professionnel des organisations faisant appel à la générosité du public. Œuvrant dans tous les champs de l’intérêt général, ses 140 membres représentent aujourd’hui 7,8 milliards d’euros de ressources annuelles, dont 2,8 milliards de financement par la générosité du public ; 393 000 bénévoles et 87 000 salariés.
Au quotidien, France générosités défend les droits et les intérêts du secteur de la générosité auprès des pouvoirs publics, accompagne ses membres, et développe les générosités en France.
En quoi peut-on dire que l’univers caritatif a toujours été pionnier de l’ESS ?
Parce qu’elles agissent au plus près du terrain, les associations et les fondations sont souvent les premières à identifier les besoins sociaux qui émergent.
Le financement par la générosité de ses organisations d’intérêt général leur permet de développer de nouvelles réponses à des besoins sociaux sans cesse évolutifs.
Occupant une place prépondérante voire exclusive pour certaines causes, ces organisations d’intérêt général ont toujours été et sont toujours encore la garantie d’un espace de liberté, d’innovation et de lien social. Elles sont aussi la preuve indiscutable qu’une gouvernance désintéressée et une activité non lucrative peuvent trouver une place originale et efficace dans la construction du monde d’après dont on a tant parlé.
En est-il toujours un acteur majeur ?
Les acteurs de la générosité au sein de l’ESS sont toujours et encore plus aujourd’hui une composante essentielle de la société française, qui chaque jour se mettent au service de la cohésion et de l’innovation sociale et environnementale, créent du lien, de l’activité et des richesses économiques, mais surtout humaines. Par leur proximité du terrain et leur réalisme, elles sont aujourd’hui un acteur essentiel du contrat social français si fragilisé dans la période actuelle.
On peut estimer à 360 000 le nombre d’associations concernées par la générosité et près de 5 400 fondations et fonds de dotations en activité présents sur le territoire. La générosité privée est l’un des carburants d’un écosystème au cœur de l’économie sociale et solidaire qui rassemble près de 15 millions de personnes bénévoles au sein des associations et plus de 2 millions de salariés travaillant dans une association ou une fondation.
Quelles évolutions avez-vous pu observer et quelles perspectives pouvez-vous tracer ?
La loi du 1er juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire (ESS) a inscrit de droit, les acteurs non lucratifs dans l’ESS aux côtés des mutuelles, des coopératives et des entreprises de l’ESS. Si cette loi présente l’intérêt d’avoir posé une définition de l’ESS et d’en avoir permis une représentation structurée autour notamment d’ESS FRANCE, il est important de reconnaître la spécificité des différents modèles et de leurs enjeux : gouvernance, accès aux financements, fiscalité…
À l’heure de la baisse des subventions publiques, une association ou une fondation dont les ressources dépendent des subventions publiques et de la générosité du public, aura plus de difficulté à mener ses projets qu’une entreprise de l’ESS qui peut ouvrir son capital à des investisseurs privés.
La confusion a été entretenue également avec la loi PACTE qui créé les sociétés à mission. Pour rappel les sociétés à mission sont celles qui inscrivent dans leurs statuts leur raison d’être et leurs objectifs sociaux et environnementaux. Sans remettre en cause la bonne intention de ces entreprises, il convient toutefois de rappeler qu’elles ne sont pas des entreprises de l’ESS.
C’est dans ce contexte que nous devons plus que jamais faire entendre la voix des acteurs à gestion désintéressée. La révision de la Loi de 2014 est une opportunité de célébration de la croissance d’une économie différenciante et une occasion d’articuler encore plus clairement nos modèles. Une réflexion que nous menons conjointement avec nos partenaires représentants comme nous les modèles d’organisations à gestion désintéressée, le Mouvement Associatif et le Centre français des fonds et des fondations.
La confusion entre acteurs lucratifs et non lucratifs est également palpable au niveau européen.
En décembre 2021, la Commission européenne présentait son plan d’action pour l’économie sociale en trois points :
1. créer les conditions propices à l’essor de l’économie sociale
2. ouvrir aux organisations de l’économie sociale des possibilités pour démarrer et se développer
3. veiller à ce que l’économie sociale et son potentiel soient reconnus.
Un plan d’action ambitieux qui englobe différents types d’entités juridiques. Or les Etats membres n’ont pas tous la même définition du secteur caritatif et proposent une large variété de statuts bien éloignés de nos concepts largement dictés par la doctrine fiscale française.
Cependant, je ne peux que saluer les travaux en cours au niveau européen : la Commission européenne a publié début septembre une proposition de directive sur les associations transfrontalières européennes qui reconnaît « l’incidence positive » des associations à but non lucratif « pour ce qui est d’assurer l’équité sociale et la prospérité des citoyens au sein de l’UE ».
Cette proposition de directive devrait faciliter la vie des associations exerçant des activités dans plusieurs Etats membres rappelant au passage des principes fondamentaux tels que la non-discrimination, l’accès au financement ou le droit de recours juridictionnel.
Reste à savoir ce que nos parlementaires européens vont en décider et comment la France va transposer ces dispositions en droit interne. Nous serons bien évidemment très attentifs à ces évolutions aux côtés de nos partenaires.






