« Paris Centre, c’est le cœur de Paris, capitale de la France »

Entretien avec

Ariel WEIL, Maire de Paris Centre

Quel est l’enjeu principal de Paris Centre ?

L’enjeu principal de Paris Centre c’est d’avoir réussi à créer une identité commune aux quatre arrondissements par-delà la diversité des territoires qui le composent. C’était un défi en début de mandature, mais c’est toujours d’actualité pour satisfaire les besoins des habitants.

La réunion des quatre arrondissements nous offrait la possibilité de penser nos politiques publiques de manière plus large et rationnelle (qu’il s’agisse du logement, de l’école, de la politique sociale ou culturelle) sans perdre le lien de proximité qu’entretenaient les habitants avec leurs élus locaux, difficulté que nous avons notamment surmonté en allant à la rencontre des habitants partout : dans les cafés mensuels itinérants du maire, les réunions publiques délocalisées, les permanences dans toutes les résidences seniors, l’accueil par nos services sociaux dans plusieurs lieux municipaux (depuis cette année !) et les rassemblements pour les seniors, les jeunes, les gardiens, où toutes les générations réunies pour des grands moments comme la fête à Noël, la rentrée ou le 14 juillet.

L’enjeu de Paris Centre, c’est aussi de réussir un équilibre subtil. Les habitants veulent vivre au cœur de Paris, au cœur de son histoire – une histoire riche, multiple, dont le patrimoine est le témoin et qui attire les visiteurs du coin de la rue comme du monde entier – mais aussi au cœur de son devenir pour un air plus pur et davantage de place aux habitants. Ils veulent être pleinement acteurs de cette ville intense, tout en se sentant protégés, écoutés, considérés.

Paris Centre, c’est le cœur de Paris, capitale de la France, ville la plus admirée du monde. Et pourtant, ce centre doit aussi rester un lieu de vie, de proximité, de partage, pour le quotidien des habitants. C’est cette tension permanente entre rayonnement international et qualité de vie locale qui fait toute la singularité de Paris Centre et le défi du pilotage de nos politiques publiques.

Tenir cet équilibre, c’est l’engagement que nous avons pris en 2020, avec mon équipe. Et depuis 5 ans, avec des moments exceptionnels, certains douloureux (comme la pandémie de COVID) et d’autres plus heureux (comme les Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris), il me semble que nous le tenons.

Pour tenir cet enjeu, quelles sont vos ambitions et priorités depuis 2020 ?

Nous traduisons d’abord cet engagement en offrant un cadre protecteur aux familles. L’augmentation de la place dédiée aux familles et la création des conditions de leur épanouissement sont notre priorité. On a trop souvent tendance à dire que les familles fuient Paris : c’est faux.

Non, la population parisienne, et particulièrement celle du centre de Paris, ne s’est pas effondrée depuis une dizaine d’années. Si dans sa très longue histoire, la population de Paris a beaucoup fluctué, à la hausse et à la baisse, il faut remonter à une cinquantaine d’années pour identifier le dernier grand mouvement démographique.

Force est de constater que depuis une vingtaine d’années, on assiste à une stabilisation de la population parisienne, et, particulièrement à Paris Centre, pareil depuis 1990, pour les enfants de 5-14 ans et les familles.

La part des familles augmente même dans le 4e arrondissement, résultat d’une politique volontariste, tandis que la population de cet arrondissement et du 2e arrondissement ont même légèrement augmenté, résultat sans grand doute de notre politique de création de logements aidés notamment familiaux ! Je me suis exprimé dans les colonnes de Libération à ce sujet.

Depuis 2020, à Paris Centre, ce sont plus de 2 000 couples qui se sont dit oui et plus de 4 000 enfants qui sont accueillis dans nos écoles maternelles et élémentaires. Nous avons considérablement renforcé les capacités d’accueil avec nos 39 crèches, nos centres de loisir et l’ouverture récente d’une Maison des Assistantes Maternelles, rue du Sentier.

Nous réaménageons les abords des écoles en y créant des rues ou parvis piétons, dits « rues aux écoles » afin de faciliter et sécuriser le trajet des familles vers l’école et d’améliorer la qualité de l’air pour les enfants.

Nous avons au total 20 rues piétonisées et végétalisées aux abords de nos écoles. Nous avons par ailleurs transformé 14 cours d’écoles et de collèges pour qu’elles soient rafraîchies, mieux partagées et plus agréables à vivre au quotidien, et nous avons permis que 3 cours d’écoles soient ouvertes aux familles le samedi pour s’y retrouver et jouer dans un centre de Paris très dense, aux logements souvent exigus.

C’est la raison pour laquelle j’ai souhaité que nous offrions aux enfants du Centre la possibilité de fêter leur anniversaire en réservant une salle à la mairie le samedi après-midi : nous venons d’ailleurs de fêter le 100e anniversaire en mairie !

La lutte contre le réchauffement climatique, inéluctable et brutal, qui passe par la végétalisation est un enjeu décisif pour une ville plus agréable à vivre. Elle passe d’abord par la replantation systématique de tous les arbres qui ont disparu et la plantation de nouveaux arbres, avec quelques beaux espaces dans un centre de Paris aussi dense et patrimonial : nous avons ainsi réussi à planter 30 nouveaux arbres Quai aux Fleurs, 90 arbres sur le parvis de l’Hôtel de Ville, 12 arbres rue Vaucanson aux abords de l’école, sans compter les arbres plantés dans toutes les cours d’écoles dont nous avons transformé les sols en îlots de fraîcheur.

Nous créons de nouveaux espaces verts : un nouveau jardin public attenant au collège Victor Hugo ouvrira fin 2025, un nouveau jardin rendra hommage aux victimes des attentats du 13 novembre 2015 désormais ouvert aux place Saint-Gervais, nous avons réaménagé et agrandi le jardin des Arts – Albert Schweitzer.

Se sentir protégé, c’est aussi pouvoir déambuler librement et en toute sécurité dans l’espace public.

J’ai fait de la protection et de la meilleure circulation des piétons mon absolue priorité, en élargissant les trottoirs (Quai aux Fleurs, rue de Richelieu, rue des Petits Champs), en créant des nouvelles places et rues piétonnes comme la place Albert Memmi ou la placette au croisement des rues Pavée-Malher, et en rendant accessible pour les personnes à mobilité réduite l’intégralité des quais de bus qui les mènent désormais plus rapidement à leur destination qu’autrefois grâce à notre plan de circulation qui introduit de nouvelles voies de bus.

Ainsi, nous avons gagné 10% de temps de trajet jusqu’à 25% à certaines heures pour les lignes 29 et 75 par exemple (temps mesurés avec la RATP).

De quels projets aboutis êtes-vous le plus fier ?

C’était un de nos engagements de campagne en 2020, c’était un rêve depuis les années 90, et depuis le 5 juillet c’est possible : nous pouvons désormais nous baigner dans la Seine, à 3 endroits, dont un au cœur de Paris Centre, entre le Pont de Sully et le Pont Marie.

Pendant les Jeux, les athlètes ont inauguré la baignade dans le fleuve lors des épreuves. Je suis très fier de voir les Parisiennes et Parisiens profiter de ce lieu, se baigner face à Notre Dame et l’Ile Saint Louis. Nous avons probablement la baignade avec l’une des plus belles vues du monde !

Un autre projet que je porte depuis 2020 et qui est en train d’aboutir est le réaménagement des abords du Musée du Louvre. C’est un moment fort, et je tiens à saluer le travail collectif qui nous a permis d’en arriver là.

Nous sommes en train de franchir une étape historique : la Ville de Paris a délégué sa maîtrise d’ouvrage à l’État, au Musée du Louvre. Cela peut sembler anecdotique ou technique mais cela signifie que le Louvre s’engage à son grand concours de transformation du musée, l’aménagement de la place du Louvre et de ses abords que je porte depuis 5 ans, en étroite collaboration avec la Ville.

C’est un partenariat ambitieux entre la Ville et l’État — le troisième de cette ampleur après les Jeux olympiques de 2024 et le réaménagement des abords de Notre-Dame. Nous savons travailler ensemble, nous savons porter de grands projets ensemble. Ce partenariat en est une nouvelle preuve.

C’est aussi l’aboutissement d’un processus que nous avons construit depuis 2020. Dès la campagne municipale, j’ai porté l’idée d’un projet de végétalisation des fossés du Louvre.

En novembre 2022, j’ai fait mener une étude historique et patrimoniale pour comprendre l’évolution de cette place. En mai 2023, cette étude a été présentée en réunion publique. En juillet 2023, nous avons voté au Conseil de Paris Centre, puis au Conseil de Paris, sur ma proposition, pour un réaménagement ambitieux de la place en lien avec le musée.

Et, en mars 2024, nous avons soumis ce projet de piétonisation et de végétalisation au vote des électeurs de Paris Centre : plus de 70 % ont voté en sa faveur.

Dans la mise en place d’un seul et unique projet de rénovation du Louvre, deux éléments sont pour moi essentiels : d’abord, l’engagement d’une concertation avec les riverains et les acteurs locaux : nous y serons très vigilants, car ce projet doit continuer à se construire avec le territoire ; ensuite, la mise en place d’une gouvernance partenariale entre la Ville et le Louvre.

Cela nous semble évident que la Ville puisse participer au jury, suivre les étapes du projet, et contribuer aux grandes orientations du projet retenu.

Ce dont je suis aussi très fier, c’est la politique de transmission de la mémoire et de sauvegarde du patrimoine. Nous avons restauré le patrimoine exceptionnel de Paris Centre : la Fontaine des Innocents et sa place Joachim du Bellay, les fontaines Molière, Maubuée, Stravinsky, Charlemagne et Louvois, les Eglises Saint-Gervais, Saint-Eustache, Saint-Germain-l’Auxerrois, ou encore le temple de l’Oratoire du Louvre.

Nous publions une carte sous forme de parcours pour permettre aux amoureux du patrimoine, Parisiens et touristes, d’admirer la restauration des bâtis et intérieurs des édifices culturels, et les fontaines du centre de Paris. Cette carte peut être consultée sur notre site internet et à retrouver dans nos lieux municipaux.

À Paris Centre, nous sommes très attachés à honorer les illustres figures de la Résistance et de la Déportation. Nous avons renommé des écoles dans chacun des arrondissements : la Résistante et Juste parmi les Nations Suzanne Spaak a donné son nom à l’école d’Argenteuil (1er) ; La Résistante et Juste parmi les Nations, Marcelle Guillemot, à l’école Beauregard (2e) ; Le Compagnon de la Libération, Daniel Cordier, à l’école rue des Quatre Fils (3e) ; Le Résistant et survivant de la Shoah, Raphaël Esrail, à l’école Ave Maria Fauconnier (4e) ; Les Justes parmi les Nations Paul et Marcelle Vergara à la place située au croisement des rues de l’Arbre Sec et Saint-Honoré (1er).

Mon souhait est que nous puissions très prochainement attribuer le nom de Ginette Kolinka à un jardin de Paris Centre. Ginette aimerait pouvoir inaugurer ce lieu de son vivant.

Enfin, nous mettons à l’honneur régulièrement des femmes ayant œuvré dans l’Histoire pour l’égalité et l’inclusion ; nous avons publié un livret répertoriant ces femmes, lors du 8 mars dernier. Je tiens aussi à mettre la lumière sur celles et ceux qui se sont battus pour les droits LGBT+ au sein du centre de Paris, et de manière ainsi aux plus jeunes des militants parisiens d’aujourd’hui. C’est pourquoi, nous avons publié une carte sous forme de parcours, afin de marcher sur les traces des mémoires LGBT+.

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