Principauté de Monaco : la puissance de liens d’amitié réciproques historiques et des engagements communs

Entretien avec

son Excellence Monsieur Jean d’Haussonville, Ambassadeur de France à Monaco

« La relation entre la France et Monaco est qualifiée de “Communauté de destin”. Nous sommes liés par une histoire commune et ancienne, que je connaissais, mais dont j’ai découvert la plénitude depuis mon arrivée. »

Vous avez été nommé en juillet 2023 Ambassadeur de France à Monaco. Comment avez-vous accueilli cette nomination ? Quelle connaissance aviez-vous en amont de la Principauté ?

J’ai été très heureux de cette nomination, car c’est un honneur de représenter son pays. C’était quelque chose dont je rêvais au début de ma carrière. Je m’en étais ensuite éloigné durant plusieurs années. Ce qui est fascinant avec la Principauté, c’est de constater qu’elle a forgé sa propre destinée, sous l’autorité des Princes. L’accès aux autorités monégasques est très facile, jusqu’au Prince qui est très bienveillant. Pour un chef de mission diplomatique, c’est agréable et important.

Vous avez été durant plus d’une décennie Directeur Général du Domaine National de Chambord, et l’avez inscrit résolument dans une nouvelle dynamique. Cette expertise et cette expérience précédentes, entretiennent-elles des passerelles avec vos missions d’aujourd’hui ?

Être directeur du Domaine National de Chambord durant 13 années a été une formidable aventure professionnelle et humaine, et une tranche de vie passionnante. J’ai été nommé et renouvelé dans mes fonctions par trois Présidents de la République successifs, Nicolas Sarkozy, François Hollande et Emmanuel Macron.

Au fond, Chambord constitue l’alliance de toutes les choses qui me passionnent, le goût de l’histoire mais aussi la préparation de l’avenir. Le sens de l’action, mais aussi de la réflexion. Le service public et le sens de l’entreprise, le patrimoine monumental, mais aussi la nature, l’environnement, l’agriculture. Quand vous restez treize ans quelque part, cela devient un métier de passion.

Quelle connaissance aviez-vous en amont de la Principauté ?

La relation entre la France et Monaco est qualifiée de « Communauté de destin ». Nous sommes liés par une histoire commune et ancienne, que je connaissais, mais dont j’ai découvert la plénitude depuis mon arrivée.

Nos deux pays sont liés par quelque 200 traités et accords, qui organisent nos relations dans le plein respect de nos souverainetés respectives. J’ai également découvert combien la mer nous unit.

La Méditerranée classique d’abord, avec une sorte de sagesse gréco-romaine et son sens de l’éternité, mais également la Méditerranée moderne, belle mais très exploitée, et que la France et Monaco ont à cœur de protéger.

Quels sont ses liens avec la France ?

La question m’est souvent posée. Et il me paraît important de confirmer le plein soutien du Président de la République au Prince Souverain. Non seulement dans l’amitié de nos traités multiséculaires, mais aussi dans une relation d’estime personnelle et de confiance entre les deux chefs d’État.

La vision qu’a Emmanuel Macron d’Albert II est celle d’un homme moderne, un homme de réformes notamment sur les enjeux de transparence financière. Mais aussi un homme d’idéal et de projets sur les grands enjeux contemporains, particulièrement la protection des océans.

Si le Président a confiance en le Prince, c’est aussi parce qu’il a un bilan de pratiquement vingt ans de règne dont on voit les résultats. Vingt ans, ce n’est pas le fruit d’un héritage, c’est le fruit de vingt ans de travail ! La croissance extraordinaire de Monaco, cette prospérité, cette capacité d’attractivité, cette concentration de fortunes sont le résultat d’un travail. Et c’est une chose pour laquelle la France a le plus grand respect.

Notre intérêt fondamental c’est évidemment la prospérité et la stabilité de Monaco. Et notre devoir amical est d’être attentif à ses besoins dans le maintien de cette prospérité.

Quels sont les champs majeurs de coopération ?

Ils sont multiples. Nous avons signé en 1994 un accord de coopération dans le domaine de l’enseignement, et les professeurs français sont très nombreux en Principauté. Nous travaillons également dans les domaines de la santé, des affaires sociales, de la lutte contre la pollution en mer et des aires maritimes protégées.

Quelle est l’importance de présence française en Principauté ?

C’est une communauté historique qui joue un rôle très important dans l’identité de Monaco. D’abord par la langue française, puis par l’histoire de Monaco, par son attachement au Prince.

Il me paraît évident qu’elle joue un rôle stabilisateur en Principauté. Le souhait des autorités est que cette communauté puisse se maintenir. Les conditions matérielles pour exaucer ce souhait ne sont pas données de manière évidente, notamment en raison du coût du logement à Monaco.

Nos deux pays, par un effort commun mais aussi par projets structurants, doivent s’efforcer de répondre à cette question de l’avenir de la communauté française à Monaco. C’est un travail collectif.

S’agissant des travailleurs transfrontaliers, 60% des salariés du secteur privé et 70 % des employés du secteur public monégasque sont français. Cette structure de l’emploi à Monaco reflète la géographie et la communauté de destin entre nos deux pays. C’est une relation gagnant-gagnant.

Quelle feuille de route est aujourd’hui la vôtre ?

Le Président de la République et le Prince Albert II entretiennent des liens d’amitié. Ils se rencontrent souvent, et le Prince était aux côtés d’Emmanuel Macron et de nombreux chefs d’État lors du 80ème anniversaire du Débarquement en Normandie, le 6 juin dernier.

Je suis pleinement mobilisé sur plusieurs enjeux communs à la France et à Monaco, comme la protection des océans. Monaco jouera un rôle clé lors de la prochaine Conférence des Nations unies sur l’Océan à Nice en juin 2025.

La Principauté organisera notamment un Forum sur la finance et l’économie bleue, un sujet central. La Conférence de Nice permettra de consolider nos échanges, déjà très intenses, et de partager nos expertises, tout en promouvant le cadre de négociations multilatérales liées aux océans.

Nous souhaitons faire de la Conférence de Nice un tournant, un rendez-vous majeur, presque 10 ans après l’accord de Paris. Le soutien de Monaco dans l’organisation de ce rendez-vous est donc essentiel.

Dans le domaine de la relation bilatérale, Emmanuel Macron et le Prince Albert II se sont également entendus sur le principe d’une visite d’État du Président de la République à Monaco, et l’Ambassade de France est mobilisée pour préparer cette échéance historique.

Il s’agit du plus haut niveau protocolaire, et le dernier chef d’État de la Vème République à avoir bénéficié d’un tel accueil en Principauté était François Mitterrand en 1984. Elle sera l’expression de l’amitié historique et du plein soutien de la France à la Principauté de Monaco.

Sur la même thématique